Vis ma vie... Une kiné chez les libraires.


Je vais peut-être te l'apprendre, ma sœur est kiné. Ma petite sœur... Elle travaille dans un milieu bien trop difficile pour moi, côtoie quotidiennement la souffrance et même la mort. Depuis près de quinze ans qu'elle exerce, elle a goûté à tout : le libéral, les centres de rééducation, l'hôpital où elle a écumé de nombreux services, tous différents. Aujourd'hui, elle a l'impression d'avoir fait le tour de son métier, je l'ai même entendue dire qu'elle ne l'aimait pas, cette profession pour laquelle elle a pourtant fait des pieds et des mains après avoir obtenu son Bac avec mention et alors que mes parents l'imaginaient très bien en prépa HEC, tellement bien d'ailleurs qu'ils m'avaient envoyée l'y inscrire pendant qu'elle se dorait la pilule sur une plage du Gard avec ses copines...!

Sans pour autant remettre en cause son engagement dans le paramédical, elle s'est lancé un défi en début d'année : passer le concours d'entrée à l'École des Cadres de Santé. Défi brillamment relevé car, à force d'un travail acharné, pas toujours de tout repos pour son entourage, elle a été reçue 1ère. Là, non seulement en tant que grande sœur, tu pètes un peu la fierté, mais surtout, tu ne regrettes pas les longues heures passées à la soutenir, à la rassurer, et aussi à l'aider à rédiger son projet professionnel, parfois un peu dans la douleur et dans les larmes, carrément dans l'urgence et l'épuisement sur la fin, la plupart du temps à distance puisque je te rappelle qu'au quotidien, 600 kilomètres à vol d'oiseau nous séparent.

Jeudi dernier, elle a donc fait, juste après sa fille pour qui c'était une grande première, sa rentrée ! Chose que j'admire car retourner sur les bancs de l'école quinze ans après les avoir quittés, retrouver une discipline de chaque instant, se replacer en position d'élève alors que jusqu'à présent, on maîtrisait tout de son métier, je ne suis pas certaine que je serais capable de le faire. Car ça demande selon moi bien du courage et une bonne dose d'humilité. Ce dont elle ne manque pas, je la connais bien assez pour te l'assurer. Mais là n'est pas le propos de ce billet !

Figure-toi donc que, comme bon nombre d'étudiants, elle va devoir effectuer un stage en entreprise. Un stage de management plus précisément. Et figure-toi, le retour de la revanche, que, ce stage, elle l'a trouvé, non sans avoir copieusement galéré au passage. Comme beaucoup d'étudiants me diras-tu !
Pour finir et à force de persévérance, elle a fini pas décrocher un stage dans une... librairie !!! Et pas n'importe laquelle puisqu'il s'agit de la plus grande/belle/réputée de Strasbourg.

Je n'en reviens pas... L'espace de 2-3 semaines, ma sœur va exercer mon métier, tu n'as pas idée de la façon dont j'ai accueilli cette nouvelle ! Je considère cela comme un merveilleux cadeau que la vie nous fait.
Même si ses conditions de travail seront forcément différentes des miennes, cette décision, cette opportunité me rendent fière. Fière et heureuse. Parce que l'expérience offre tellement plus que ne peut le faire le partage, ma sœur va découvrir par l'intérieur ce dont sont faites mes journées, les joies de mon métier comme ses côtés les plus sombres. Elle va devoir jongler entre les épuisantes heures de manutention, les soucis de réapprovisionnement, les commandes à passer et les clients, pas toujours simples, pas toujours aimables. Elle va devoir s'ouvrir à des sujets qui, en principe, ne l'attirent pas, au moins histoire de se tenir un peu au courant et de gagner en performance. Elle va devoir préparer son cerveau à emmagasiner des centaines d'informations à l'heure, se familiariser avec un fonctionnement, un système de classement, avec des notions dont elle ne connaît rien.
Je n'ai pas le moindre doute sur le fait qu'elle va y arriver, et que ça va la passionner. J'espère que ces quelques semaines en librairie vont la rendre aussi heureuse que je l'ai été en exerçant ce métier. Étrange d'ailleurs que ce switch arrive au moment où je m'apprête à lui tourner le dos, à ce métier qui me passionne, et que je garderai dans mon cœur jusqu'au bout, tout au bout de ma vie...

Mais j'ai quand même un petit regret : l'échange ne sera jamais possible dans l'autre sens... Je ne pourrai jamais me glisser dans la peau d'un kiné !

*

Commentaires

  1. Je ne savais pas que tu étais libraire (comme moi, qui d'ailleurs est en train tout comme toi de tourner le dos à ce métier). Pourquoi changes-tu de voie si ce n'est pas indiscret?

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  2. C'est une très belle histoire (vraie), les échanges vont fuser. Mais j'ai la même question que Gwendolune ... :)

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  3. Tu es libraire ??? Je savais pas! Mon rêve!

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  4. Dis donc quel courage a ta soeur!
    Et c'est génial aussi de pouvoir découvrir un autre milieu professionnel... pour une fois que la fonction publique n'est pas sectaire!!

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  5. Tu es libraire et tu changes ? Elle est kiné elle n'aime plus ? Oh lala mais on a tellement besoin de bons kinés ! Vous ne pouvez pas vous associer ? Une librairie reconnue d'utilité publique avec salle de kiné et accessoirement un distributeur de thé mais du bon... je ne sais pas moi euhhh non ?

    Tu aimes beaucoup ta soeur et cela se sent et c'est beau ! Bisous Anne-Laure :)

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  6. Oh, cela doit être super ça comme échange. Puis, cela doit aussi être un sentiment doux pour toi de pouvoir échanger sur ton quotidien.

    Si ce n'est pas indiscret, tu voudrais t'orienter vers quoi maintenant ?

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  7. Pour moi aussi, le retour sur les bancs est à l'ordre du jour cette année. J'ai commencé la semaine dernière. C'est un autre rythme que celui du travail mais c'est ce que je voulais ! Ta sœur est plus forte que moi, je n'ai pas encore trouvé mon stage ! Grosses bises

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